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Changement des facteurs locaux de commercialité sur la valeur locative

Quelle est l’incidence d’un changement des facteurs locaux de commercialité des lieux loués sur la valeur locative ?

Les facteurs locaux de commercialité se rattachent à certains éléments tels que la situation (ville, quartier ou rue), la répartition des diverses activités dans le voisinage, les moyens de transport, l’attrait particulier de l‘emplacement pour l’activité considérée, etc.

La modification de ces facteurs peut constituer un motif de déplafonnement du loyer si elle présente un intérêt notable pour le commerce.

Notion de commercialité

L’article R 145-6 du Code de commerce, sans donner une définition générale, précise les critères d’identification des facteurs locaux de commercialité. La liste non exhaustive indique des facteurs comme :

  • L’attrait particulier ou les sujétions que présente l’emplacement pour l’activité concernée ;
  • Les moyens de transport dans le secteur ;
  • La répartition des différentes activités dans le voisinage ;
  • Les modifications que ces éléments subissent d’une manière durable ou provisoire ;
  • Etc.

Ces éléments doivent servir à caractériser l’aptitude plus ou moins grande d’un secteur à permettre aux commerçants qui y exercent leur activité de réaliser des profits, grâce aux seules qualités de ce secteur, à l’exclusion de l’aptitude des exploitants.

L’évolution de ces facteurs doit, selon la jurisprudence, être appréciée non dans la zone de chalandise potentielle (zone dans laquelle le locataire peut développer une clientèle par ses efforts), mais sur la zone de chalandise naturelle.

La zone de chalandise naturelle est fonction de l’importance de la localité où se situe le fonds de commerce. Plus la ville est étendue, plus on se rapproche du centre, plus la zone de chalandise est restreinte. La commercialité peut varier dans un quartier d’un secteur à l’autre, d’une rue à l’autre, d’une partie de rue à une autre, ou d’un trottoir à l’autre.

Cette zone peut également varier en fonction de la nature du commerce exploité. Sa délimitation exige une analyse de la situation de la concurrence, de la clientèle, du comportement des consommateurs, de l’implantation de l’enseigne. La zone de chalandise se situe dans l’enceinte délimitée par la zone d’influence primaire des autres points de vente de l’enseigne.

Appréciation des facteurs locaux de commercialité

Il revient au bailleur d’apporter la preuve de la modification de la commercialité. Sur quels indices apprécie-t-on le changement des facteurs ?

Critères matériels

Constructions nouvelles : Il s’agit d’édification de constructions à l’intérieur de la zone de chalandise du local loué. Ce critère doit cependant être recoupé avec l’évolution de la population. Il faut également vérifier s’il s’agit réellement de constructions nouvelles et non de simples rénovations du Bien existantes.

Accroissement de la population : Pour les commerces de proximité, en particulier, une augmentation substantielle de la population peut constituer un motif de déplafonnement du loyer.

Création de parcs de stationnement : La création de parkings combinée à certains critères peut entrainer la modification de la commercialité. Pour être retenu, ce facteur doit faciliter le stationnement dans un secteur où les possibilités de garer étaient auparavant difficiles, voir impossibles.

Moyens de transport : Une amélioration des voies de communication et des moyens de transport dans le quartier ou le secteur a forcément un impact important sur la commercialité. Ces aménagements apportent généralement une clientèle supplémentaire pour le commerce considéré. Si ce n’est pas le cas, cet élément ne sera pas retenu.

Transformation physique de la rue : La création de voies piétonnes, l’élargissement des trottoirs, l’agrandissement d’une place, l’établissement d’un centre commercial ou l’implantation presque simultanée de nouveaux commerces dans une rue peut justifier le déplafonnement du loyer.

Autres éléments

L’arrivée massive d’enseignes dans un quartier peut constituer une cause de déplafonnement si ces implantations génèrent un nouveau flux de clients au commerce du locataire.

La valeur locative du bail commercial peut être relevée rien qu’en suivant l’évolution des prix de cession du droit au bail et des loyers dans un secteur. Cependant, ces augmentations constatées ne doivent pas traduire des tendances purement spéculatives qui cachent une évolution factice.

Dans l’appréciation du changement des facteurs, on peut également tenir compte de l’évolution du chiffre d’affaires du locataire pour relever le loyer. Toutefois, l’augmentation du volume des ventes réalisées ne doit pas résulter des efforts personnels du commerçant.

Pour un centre commercial, la modification de la commercialité s’apprécie essentiellement en fonction des facteurs intrinsèques au centre, tels que l’extension des surfaces de vente, l’implantation de nouveaux commerces, l’amélioration du stationnement. On peut cependant considérer des éléments extérieurs qui influencent la commercialité.

Intérêt pour le commerce concerné

Selon l’article R 145-6 du Code de commerce, pour justifier le déplafonnement du loyer du bail commercial, le changement des facteurs commerciaux doit profiter ou avoir un intérêt pour le commerce concerné.

Cet intérêt suppose que les facteurs identifiés ont généré au cours du bail à renouveler une affluence complémentaire de clientèle qui a profité de façon objective ou mesurable à l’activité exercée dans l’immeuble loué. On prend en compte uniquement les modifications de facteurs qui ont une influence directe sur le commerce en question.

L’intérêt ne se détermine pas en fonction de l’ensemble des activités autorisées par le bail, mais seulement au regard du commerce effectivement exercé dans les locaux loués. L’appréciation de la modification doit se référer objectivement au secteur d’activité, sans se baser sur la performance particulière du fonds de commerce.

Le juge apprécie in concreto les facteurs commerciaux, vérifie leur importance et leurs incidences réelles, et non virtuelles sur le commerce.