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Bail commercial

La reprise des lieux loués par le bailleur à la fin du bail commercial

La reprise des lieux loués par le bailleur à la fin du bail commercial

Le propriétaire d’un local commercial dispose d’un droit de reprise à la fin du bail commercial. Quelles sont les conditions d’exercice de ce droit ?

Reprise pour habiter

Conditions d’exercice

Le droit de reprise du bailleur porte sur les locaux destinés dans le contrat de bail à un usage de logement. Il ne peut exercer ce droit :

  • Lorsque les locaux commerciaux et les locaux d’habitation forment un tout indivisible ;
  • Si les locaux sont affectés à un usage d’hôpital, d’hôtel, d’enseignement, de location en meublé ;
  • Lorsque le locataire prouve que la privation de jouissance des locaux d’habitation cause un préjudice lourd à l’exercice de son commerce. Le juge apprécie la gravité du trouble dont la preuve est apportée par le locataire.

Malgré ces contraintes, le propriétaire peut refuser de renouveler le contrat de bail à condition de verser une indemnité d’éviction au locataire.

Seul le bailleur personne physique peut exercer le droit de reprise pour habiter, les personnes morales n’en bénéficient pas puisqu’elles ne peuvent occuper personnellement le logement.

Il en est ainsi même si la reprise vise à loger le personnel de la société ou si elle est envisagée pour des opérations qui n’ont aucun caractère commercial.

Bénéficiaires

À qui doit profiter la reprise ?

Le code de commerce énumère limitativement les bénéficiaires de la reprise : le bailleur, son conjoint, ses ascendants, ses descendants ou ceux de son conjoint.

Le local d’habitation est repris uniquement pour le bénéficiaire ne disposant pas d’un logement répondant à ses besoins normaux et à ceux des membres de sa famille vivant habituellement ou domiciliés avec lui. Ces besoins normaux doivent correspondre à une utilisation normale de l’immeuble repris.

Obligation du bénéficiaire

Le bénéficiaire doit proposer au locataire sortant un local de remplacement. Il n’y est pas tenu si aucun bien n’est disponible lors de son départ.

Le bénéficiaire doit occuper personnellement les lieux dans un délai de six mois à compter du départ du locataire évincé et pendant une période minimum de six ans, sauf motif légitime. Autrement, le locataire a droit à une indemnité d’éviction équivalant à l’importance des locaux repris.

Indemnisation du locataire

En principe, le locataire n’a pas droit à une indemnité d’éviction, sauf si le bénéficiaire n’occupe pas personnellement le logement.

Il bénéficie cependant du renouvellement de son contrat de bail pour les locaux commerciaux. Le loyer du bail renouvelé doit dans ce cas être diminué en tenant compte du préjudice subi par le locataire ou son ayant droit dans l’exploitation du fonds de commerce.

S’il est prouvé que le bailleur a mis en œuvre son droit de reprise pour faire échec de façon frauduleuse aux droits de l’occupant, ce dernier doit bénéficier d’une indemnité égale au montant du préjudice subi.

Reprise de locaux pour nécessité de travaux

Le propriétaire peut reprendre ses locaux à l’expiration d’une période triennale ou en fin de bail lorsque leur récupération est motivée par la réalisation de certains travaux.

L’exercice de ce droit exige le paiement d’une indemnité d’éviction, sauf si le bailleur propose un local de remplacement.

Construction ou reconstruction d’immeuble

Conditions

Il doit s’agir de construction ou de reconstruction réelles notamment pour cause d’insalubrité :  pas de simples travaux d’aménagement, de transformation ou de réparation.

Si le bail porte sur un terrain nu et permet au locataire d’y édifier des constructions, le bailleur doit être propriétaire du terrain et des constructions qui y seront érigées.

La reconstruction doit être totale, ce qui implique la démolition de l’immeuble existant. Toutefois, les travaux de démolition-reconstruction peuvent porter sur la partie de l’immeuble affectant la totalité des lieux loués, à condition que la configuration du bâtiment le permette.

Les juges apprécient au cas par cas les travaux envisagés ou déjà réalisés pour conclure à une reconstruction ou non.

L’intention du bailleur de détruire l’immeuble pour le reconstruire doit être avérée à la date du congé. Sa sincérité est présumée, ce qui lui épargne l’obtention d’un permis de construire et Il n’a pas à justifier la reconstruction.

Dans le cas d’une fraude, Il revient au locataire contestataire d’établir la duplicité du bailleur. Il peut obtenir l’annulation du congé en invoquant les dispositions légales si, à la date où il est donné, le bailleur ne souhaite plus reconstruire l’immeuble repris.

Local de remplacement

Le locataire ne perçoit pas d’indemnité si le propriétaire met à sa disposition un local de remplacement ayant un emplacement équivalent et correspondant à ses besoins.

Le bailleur doit, dans l’acte de refus de renouvellement ou dans le congé, mentionner l’offre d’un local et préciser les nouvelles conditions de location.Le local doit exister au moment il le propose, ce qui exclut les offres portant sur des locaux à construire.

Dans un délai de trois mois, le locataire peut accepter la proposition par acte extrajudiciaire ou saisir la juridiction compétente. À l’expiration de ce délai, le silence du locataire vaut acceptation.

En cas de relogement, le locataire évincé peut bénéficier de certaines compensations financières qu’il perçoit même s’il refuse de reloger dans les locaux de remplacement reconnus satisfaisants par le juge. Cependant, le locataire ne peut bénéficier de cette disposition que s’il occupe encore matériellement les lieux.

Des dommages-intérêts peuvent être réclamés au bailleur qui a exercé frauduleusement son droit de reprise pour éviter le paiement d’une indemnité d’éviction en offrant un local de remplacement.

Seule une offre acceptée ou jugée valable peut libérer le bailleur du paiement de l’indemnité.

Travaux de surévaluation

Le bailleur peut reporter le renouvellement du bail pendant maximum trois ans s’il décide de travaux de surélévation nécessitant le départ temporaire du locataire. L’occupant a alors droit à une indemnité égale au préjudice, sans qu’elle excède trois ans de loyer.

Terrain loué nu

L’obtention du permis de construire d’un immeuble d’habitation sur tout ou partie d’un terrain loué nu autorise le bailleur à exercer son droit de reprise, mais uniquement sur la partie du terrain indispensable à la construction.

S’il bâtit un immeuble à un autre usage que celui de logement, il doit verser une indemnité d’éviction totale.

Secteur sauvegardé

Les secteurs sauvegardés visent à protéger tout ou partie d’un ensemble d’immeubles bâtis ou non bâtis qui présentent un caractère historique, esthétique ou qui demandent des travaux pour leur conservation, restauration ou mise en valeur.

Le bailleur qui y réalise des travaux peut reprendre ses locaux :

  • À l’échéance triennale ou à la fin du bail. Dans ce cas, les règles relatives à la reprise pour construire ou reconstruire sont applicables.
  • À tout moment, à condition de reporter le bail du locataire sur un local équivalent, dans le même immeuble ou dans un autre bâtiment.